Existe-t-il une différence entre le réemploi et la réutilisation ? Cette question est légitime quand on considère la similitude entre les deux termes.
Cependant, la réponse à cette interrogation est belle et bien affirmative. Il y a bien une différence entre eux.
Par ailleurs, le réemploi et la réutilisation entrent pleinement dans le cadre de l’économie circulaire. Ils permettent de prolonger la durée de vie d’un produit et contribuent à la limitation de la production des déchets.
Le réemploi et la réutilisation constituent des activités qui jouent un rôle structurant en ce qui concerne les politiques de prévention des déchets. Ils créent aussi de la valeur ajoutée.
Définitions des concepts
L’article L541-1-1 du code de l’environnement permet de définir le réemploi et la réutilisation en ces termes :
Le réemploi
Il s’agit de toute opération à travers laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets, sont utilisés à nouveau. Cette utilisation est destinée à un usage identique à celui pour lequel les produits sont initialement conçus.
La réutilisation
C’est une opération par laquelle une substance, produit ou matière, devenu un déchet, est utilisée à nouveau. Cette dernière utilisation peut être différente de l’usage pour lequel le produit est initialement destiné.
La différence entre le réemploi et la réutilisation est donc liée à l’usage prévu et au statut de l’objet concerné. La réutilisation concerne ainsi les déchets alors que pour le réemploi, l’objet peut encore être en état de marche.
Concrètement, l’opération de réutilisation est initiée lorsque le détenteur d’un produit s’en sépare et le dépose dans une déchetterie ou dans une borne d’apport volontaire. Ce bien est alors considéré comme un déchet.
Dès ce moment, il entre dans un processus de traitement des déchets. C’est la "préparation en vue de la réutilisation". À la suite de ce processus, le déchet devient à nouveau un produit qui peut être utile à un nouveau détenteur ou acquéreur, qui lui donnera alors une seconde vie.
Les dispositions légales en faveur du réemploi et de la réutilisation
En France comme dans l’Union Européenne, la loi prévoit des dispositifs de Responsabilité Élargie des Producteurs (REP). Ceci est en rapport avec des objectifs chiffrés de réutilisation en ce qui concerne les Déchets DEEE, déchets d’équipements électriques et électroniques, mais aussi les véhicules hors d’usage et les déchets issus des éléments d’ameublement.
Ainsi, depuis le 1er janvier de l’année 2017, les producteurs sont soumis à une obligation. Celle d’informer les consommateurs de la disponibilité des pièces de rechange issues de l’économie circulaire lors de l’entretien ou de la réparation d’un véhicule par exemple.
Si la différence entre le réemploi et la réutilisation est évidente, les deux concepts sont au cœur de la stratégie nationale pour une économie circulaire.
La loi REEN met l’accent sur le réemploi et la réutilisation
La loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique est promulguée en 2021. Au nombre des objectifs qui la sous-tendent, figure l’objectif de limitation du renouvellement des appareils. Ceci se fait en trois phases :
- Dans un premier temps, la loi REEN accentue les dispositions de la loi AGEC relative au rallongement de la durée de vie des produits. Les distributeurs sont alors contraints de communiquer aux consommateurs des informations claires pour l’entretien des produits afin de rallonger leur durée de vie. En ce qui les concerne, les acheteurs publics doivent tenir compte de l’indice de réparabilité pour les produits numériques lors de la passation des marchés.
- Le deuxième axe de cet objectif est lié à ce qui nous concerne : le réemploi et la réutilisation. Au terme de l’article 15 de cette loi, les anciens équipements informatiques des services de l’État ou des collectivités doivent s’orienter vers le réemploi ou la réutilisation. Par ailleurs, les reconditionneurs, les réparateurs et les vendeurs professionnels sont considérés comme des destinataires de pièces détachées au terme de l’article 18 de la même loi.
- Le dernier axe de ce volet est relatif à la fixation d’objectifs dans le cadre de l’économie circulaire. Ainsi, des opérations nationales d’envergure sont prévues afin de collecter tout ou partie de la centaine de millions de téléphones qui dort dans les tiroirs des Français.
La loi AGEC aussi met l’accent sur le réemploi et la réutilisation
La loi Anti gaspillage et économie circulaire du 10 Février 2020, elle aussi fait du réemploi et de la réutilisation des leviers phares. Elle dispose de certains mécanismes visant justement à rallonger la durée de vie des produits numériques notamment. En effet :
- Elle oblige les producteurs à rendre disponibles les pièces détachées des petits équipements informatiques et de télécommunications, des moniteurs et des écrans ;
- Elle favorise en outre, dans son article 22, une extension de la garantie légale de conformité de 6 mois pour les produits ayant fait l’objet d’une réparation ;
- Une autre mesure phare est l’obligation faite à l’État, aux collectivités et leurs groupements d’acquérir certains biens issus du réemploi et de la réutilisation. Le décret No 2021-254 du 09 mars 2021 fixe des objectifs d’achat pour les produits numériques en particulier.
Les acteurs du réemploi et de la réutilisation
Plusieurs groupes d’acteurs officient dans le cadre du réemploi et de la réutilisation.
Les structures de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS)
Ce sont des associations, des mutuelles, des fondations, des coopératives qui offrent aux citoyens la possibilité d’acquérir des équipements à moindre coût. Elles œuvrent pour concilier le respect des principes de l’Économie Sociale et Solidaire tout en menant une activité économique.
Les détenteurs de biens qui souhaitent s’en séparer sans compensation financière font appel aux structures de l’ESS, soit directement, soit via un point d’apport volontaire.
Les éco-organismes
Parmi eux, e-dechet, une déchetterie virtuelle mise en place par Ecologic France. C’est un acteur majeur de la collecte et du recyclage des déchets d’équipements électriques et électroniques.
Mais les éco-organismes ne sont pas les seuls acteurs.
Les acteurs publics
On y retrouve l’État, à travers le Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer et l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). L’Ademe est le bras opérationnel de l’État. Elle est considérée comme l’Agence de la Transition écologique. Elle joue un rôle d’information et de conseil auprès de tous les acteurs de la Transition écologique.
Les acteurs territoriaux
Ce sont les collectivités territoriales en général, notamment les communes, les départements et les Régions. En se basant sur leurs plans ou programmes de protection de l’environnement, ils initient des activités pour soutenir le réemploi et la réutilisation. Ceci à travers des campagnes de sensibilisation, la prise de mesures au niveau local, des dispositifs d’aide à certains volets de l’économie Sociale et Solidaire.
Des partenariats sont aussi parfois initiés avec les associations et les organismes pour des actions communes.
Les producteurs et les distributeurs
Dans le cadre de la Responsabilité Élargie du Producteur, les producteurs des biens de consommation sont contraints d’organiser et de financer l’enlèvement et le traitement des déchets issus de leurs produits. Soit directement, soit en transférant leur responsabilité à un éco-organisme. Cela concerne notamment les DEEE.
Quant aux distributeurs, ils sont tenus de :
- Reprendre gratuitement un appareil usagé lors de l’achat d’un produit neuf du même type, y compris lors de la livraison ;
- Informer les utilisateurs de l’obligation de ne pas jeter les DEEE dans le même bac que les déchets ménagers. Ils doivent les renseigner sur les effets potentiels des substances nocives que contiennent les équipements électriques aussi bien sur la santé de l’Homme que sur la nature.
Les consommateurs
Ils sont des maillons stratégiques de la chaîne et jouent un rôle important dans l’allongement de la durée de vie des produits. Il leur revient la responsabilité d’acquérir des produits robustes, en privilégiant la réparabilité et donc le remploi ou la réutilisation. Ils peuvent aussi acquérir des produits de seconde main.
Pour conclure : le remploi et la réutilisation sont deux notions différentes. Cependant, elles sont toutes les deux des axes majeurs de l'économie circulaire.